EDUCATION : CONFIANCE vs MERITE

Mis à jour le 29/07/2018 | Publié le 18/06/2018 | Économie et social, Édito, Monaco, Politique

L’éducation a été à l’honneur, si je puis dire en ce premier semestre 2018, avec, au moins, la parution de deux ouvrages.

Le premier de Barbara Lefebvre : « génération j’ai le droit » ou « la faillite de notre éducation » et l’autre du ministre français de l’éducation, Jean–Michel Blanquer : « construisons ensemble l’éducation de la confiance ».

Si les titres sont largement opposés, je me demande finalement si ce n’est l’ensemble du système éducatif qui est remis en question par nos deux auteurs, quand bien même les mots sont différents, « virulents » pour l’une ou « constructifs » pour l’autre.

Cette question interpelle chez nous à Monaco, car nous suivons le système éducatif français. Nous l’avons suivi depuis longtemps et avec succès ; je suis même très heureux de l’avoir suivi. Au point même d’y avoir enseigné quelques temps dans une Grande Ecole et à l’Université.

Par ailleurs, les résultats chez nous à Monaco pourraient être qualifiés « d’excellents », au point que nous pourrions dormir sur nos lauriers. Mais comme on le sait et sans jamais l’oublier ; « au royaume des aveugles les borgnes sont rois ».

Cela fait trois générations, au moins, que le système éducatif français se délite. Ce qui se passe dans le monde ne peut être oublié. D’ailleurs, Michel Blanquer de souligner les enquêtes internationales qui montrent un glissement de la France dans les classements.

Les résultats sont très clairs : un chiffre, 22,5 % des 760 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans n’ont pas de lecture efficace.

Mais les mots, masquent les maux.

Le ministre français nous parle « des inégalités sociales », du « volontarisme pédagogique » ; j’en passe, pour donner confiance à l’ensemble du système éducatif.
Sauf, qu’à raisonner dans un bocal bien hermétique, il oublie que l’éducation de demain c’est d’abord « le mérite », eu égard à la compétition internationale, laquelle ne se livre pas uniquement en termes économiques, mais d’abord et surtout, en termes d’éducation et l’apprentissage.

En revanche, « l’idéologie et la morale » sont, elles, bien présentes. Et pourtant les signes sont là depuis longtemps : « le réexamen des programmes de façon à en faciliter l’usage et même le simplifier » !
Egalité quand tu nous tiens ! Ainsi le même, de dénoncer : « un bon nombre d’élèves vont à l’école, non pour apprendre, mais pour avoir de bonnes notes » !
On croit rêver !
D’ailleurs, les notes ne servent plus à rien et progressivement le système d’éducation est passé de deux épreuves du baccalauréat, à aujourd’hui, 1 seule épreuve dont 40 % des notes relèvent du contrôle continu en terminale. Je me demande bien à quoi j’ai échappé.
Reste que cette évaluation « à la mode française » s’éloigne peu à peu du monde tel qu’il est et surtout pour les jeunes générations celui qu’il va devenir. Car le monde bouge autour de nous au cas où certains l’auraient oublié.

Or, l’OCDE procède à un classement appelé « PISA » qui concerne les élèves de 15 ans et qui évalue « ce qu’ils savent, et ceux qu’ils peuvent faire avec ce qu’ils savent » !

540 000 élèves représentatifs de quelque 29 millions d’élèves âgés de 15 ans, scolarisés dans 72 pays ont passé l’épreuve d’une durée de deux heures.

PISA évalue dans quelle mesure les élèves qui approchent le terme de leur scolarité obligatoire possèdent « certaines connaissances et qui leur permettent de vivre dans nos sociétés modernes ».

L’enquête se concentre sur des matières clés des programmes scolaires à savoir :
Les sciences, la compréhension de l’écrit, et les mathématiques.

Les résultats de 2015, sont clairs : il me paraît important de les signaler même si toujours quelques chiffrent obstruent la pensée :
la performance des élèves en sciences et leur attitude à l’égard de la science : Singapour devance tous les autres pays suivis par le Japon, l’Estonie, la Finlande, le Canada… la France, juste au-dessus de la moyenne est classée 27e.

• Pour la compréhension de l’écrit, le classement est à peu près identique ; les pays asiatiques se disputent les premières places et la France se classe 18e.

• En mathématiques, la France est 19e, juste au-dessus de la moyenne et les mêmes pays asiatiques au sens large sont en tête.

Sur l’ensemble des trois thèmes ci-dessus avec une moyenne de 18,4, la France tient son rang eu égard à la moyenne de 15,3 pour l’OCDE ; tout en restant 14e.

Cette enquête a lieu tous les trois ans. En 2012, la France était 25e en mathématiques, 21e en compréhension de l’écrit et 24e en sciences, toutefois, dans ce domaine avec des chiffres inférieurs à la moyenne.

Les interrogations idéologiques et morales laissent de côté le mérite et l’évaluation. Aujourd’hui, cela n’apparaît pas encore clairement dans les classements, mais dans dix ans, alors que la concurrence se fera pour les emplois sur le marché mondial avec des demandeurs d’emplois eux-aussi mondiaux.

Les enfants de 15 ans auront de plus en plus de concurrents. D’ailleurs ce glissement progressif de l’éducation se retrouve en première année d’université et le bac « offert », conduit à des redoublements voire des abandons, de plus en plus nombreux dès la fin de la première année d’Université ! Qu’à cela ne tienne, en Médecine quelques universités commencent, à Paris à interdire le redoublement à la fin de la première année !! Par exemple, à la Faculté de Pharmacie Paris Descartes le but est « de ne pas faire perdre de temps à l’étudiant avec un redoublement » car 40% à 50% sont en échec, lors de la deuxième tentative ; les étudiants sont donc réorientés.

L’éducation est sans doute l’axe fondamental pour préparer l’avenir nous amis français sont malheureusement très éloignés d’avoir pris conscience concrète et politique de ce qu’il faut faire. Mais c’est vrai que le temps passé à discuter par exemple, sur la forme inclusive, est loin d’être approprié au monde de demain qui s’annonce.
Sans doute, à Monaco, devions nous participer à la prochaine enquête PISA.
Daniel Boeri

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