Dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, le régime chinois a réprimé, de façon violente, les manifestations d’étudiants.
Par là même, le dirigeant chinois Deng Xiaoping mettait brutalement fin à la contestation qui se développait dans tout le pays, depuis le mois d’avril.
La répression d’alors est estimée aujourd’hui entre 2700 et 3400 morts !
Quand bien même ces chiffres n’auraient-ils rien à voir avec ceux de la famine qui marqua l’échec du Grand Bond en Avant (1958–1962), entraînant la mort de 30 à 40 millions de personnes, donnant un coup d’arrêt à la collectivisation des terres et proposant des réformes économiques ; le souvenir de Tienanmen choque assurément.
Comparaison n’est pas raison, toutefois cet anniversaire est l’occasion pour les pays occidentaux et autres défenseurs des droits de l’Homme de revenir sur cette atroce nuit, pour dénoncer la nouvelle marche en avant de l’Empire du Milieu.
La morale, comme très souvent, prime sur les faits !
Or, comme dit l’adage cher à Deng Xiaoping ; « peu importe que le chat soit noir ou blanc, l’essentiel est qu’il attrape des souris ».
Le pragmatisme chinois, c’est-à-dire l’adaptation aux situations, a conduit Pékin à relier les situations et non les isoler, et à mettre en place « en même temps » ; d’un côté « le marché » et de l’autre un « État fort ».
Résultat, alors que pendant des siècles la Chine fut humiliée et son histoire oubliée, elle développe aujourd’hui une stratégie pour faire en dix ans, ce que l’Occident a fait en 50 ans !
L’Empire du Milieu est, d’ores et déjà, la deuxième économie mondiale et est en passe d’atteindre bientôt la première place.
De fait, entre 2000 et 2015, les exportations chinoises ont augmenté de plus de 800 % et pèse plus 10% du commerce international (contre 1,5 % en 1980 et 3,5% en 2008).
Dans le même temps, avec ses 1,3 milliard d’habitants la Chine est composée d’une mosaïque de 55 ethnies, quand bien même, celle des Han, constitue à elle seule 92 % de la population ; 18 d’entre elles comptent, chacune, plus d’un million de personnes avec de grandes minorités qui connaissent des mouvements indépendantistes, les Ouigours et les Tibétains (le Tibet a été intégré dans l’empire chinois en 1720).
Là encore comparaison n’est pas raison mais, moins de 200 000 « gilets jaunes » et souvent beaucoup moins, ont bousculé la France pendant six mois …
La Chine, c’est aussi un mode de vie totalement transformé depuis la fin des années 70.
Notamment, 400 millions de Chinois qui vivaient dans les zones rurales sont sortis de la pauvreté et 270 millions de paysans ont immigré vers les villes en trois décennies.
Certes les inégalités demeurent évidemment et en même temps l’accès à Internet a explosé passant de 2 % en 2000, à plus de 50 % de la population aujourd’hui : c’est la culture qui change.
Pour la Chine, le développement intérieur est une nouvelle frontière et la relative ouverture a beaucoup de mal à se diluer à travers les esprits.
Reste que depuis 2000, le PIB par habitant a été multiplié par plus de 7 !
Mieux ou pire diraient certains, profitant du retrait des États-Unis, la Chine se renforce avec succès aux Nations Unies et cherche même à lui imposer, ses propres valeurs.
Tiananmen, c’est d’abord l’histoire d’un massacre qu’il convient de ne pas masquer, mais Pékin c’est en même temps un plan de développement universel. Une main de fer dans un gant de velours où, le nationalisme se combine avec le gout pour le risque, que certains semblent trop oublier ces derniers temps.
Daniel BOERI
Crédit photo : AP/Jeff Widener