Cet édito de rentrée vise à faire un point relatif à la pollution crée par les navires de croisières « à quai » une journée, sans émotion, ni état d’âme pour informer sans alarmer, ni nier ! Cette question a soulevé une déferlante sur les réseaux sociaux, qui s’étaient montrés largement mieux inspirés dans d‘autres occasions.
Oui ! Il existe des études relatives à la pollution provoquée par les navires de croisières « à quai » (en 2015, 2016 et 2017)
Elles ont été menées par France Nature Environnement, France Nature Environnement PACA et l’ONG allemande NABU. Des enquêtes furent menées, la première année à Marseille et en 2017 à Marseille et Nice. Il s’agissait de mesurer la pollution provoquée par un bateau de croisière XXL, accosté au port une journée.
Les résultats sont malheureusement clairs. Un bateau de croisière à quai, émet en particules ultra fines, l’équivalent des émissions de 1 million de véhicules par jour ! Pour référence, il entre et sort de Monaco 107 000 véhicules par jour, sans compter la circulation des résidents. Toutefois, beaucoup de véhicules « entrées sorties » relatifs aux pendulaires restent dans les parkings une grande partie de la journée.
Mettre en avant la pollution due aux navires de croisière n’est ni interdit, ni encore moins démagogique.
De plus, je n’ai jamais entendu quiconque proposer la suppression des croisières, ni moi-même le dire !
Peut-être s’agissait-il, d’un nouveau vaccin, bien connu cependant depuis des lustres, à titre préventif, « prêcher le faux pour savoir le vrai » ; j’espère que non!
On nous dit aussi qu’il n’y aurait pas de solution ; sous-entendu à quoi bon soulever la question. Là encore ceci est inexact, mais puisqu’on nous invite à mettre un mouchoir sur la réalité je me vois dans l’obligation de préciser, pour l’information de tous.
Les émissions du transport maritime causent en Europe la mort prématurée de 60 000 personnes par an et évaluée par les O.N.G à un coût de 58 milliards d’euros pour l’ensemble des services de santé européens.
Pour être précis, un lien a été établi entre les gaz d’échappement des cargos de grandes tailles, non des bateaux de petites tailles eux branchés électriquement, et plusieurs maladies cardio-vasculaires, identifiées par les recherches de l’université de Rostock et le centre de recherche sur l’environnement allemand Helmholzzentrum Munich.
Deux polluants émis sont particulièrement surveillés, l’oxyde de soufre et l’oxyde d’azote.
Il y a en réalité plusieurs solutions ; même si certaines sont plus simples que d’autres.
La pollution et les émissions de particules ultra fines sont liées à l’utilisation du fuel lourd et le diesel marin, dont la teneur est jusqu’à 3500 fois plus élevée en soufre que celle du diésel automobile.
Pourquoi ?
« A quai », un bateau de croisière brûle ses déchets, non raffinés et particulièrement polluants, pour alimenter en énergie le navire toute la journée.
D’ailleurs, la nomenclature des recettes pour Monaco dues aux bateaux de croisières, publiée sur les réseaux sociaux, précise bien que la SMEG ne touche rien. ! Évidemment, et toute la question est là.
Il faut alimenter le navire en permanence, pour les croisiéristes, pour l’équipage et pour les services à bord, etc. et brûler de ce fait du fuel lourd, car il n’y a pas aujourd’hui de branchement électrique pour alimenter les navires de grande taille !
Des solutions existent
- Pour réduire la pollution, une première solution consiste à utiliser du Gaz Naturel Liquéfié (GNL). Cette alternative réduit de 100 % les émissions d’oxyde de soufre, de 80 % les oxydes d’azote et de 20 % le CO2 par rapport au fuel lourd.
Si ce choix apparait être une ardente obligation, on imagine bien la difficulté et le coût pour y parvenir. De fait, chacun l’aura compris il est difficile de changer brutalement l’approvisionnement en énergie un moteur ; je n’essaierai pas avec ma voiture, même non diesel ! Aussi le passage au fuel léger peut être une étape intermédiaire
- Deuxième piste : un système d’alimentation électrique à quai permettrait d’éteindre les moteurs auxiliaires et ainsi d’utiliser le réseau électrique auxquels le port devrait être raccordé, or aujourd’hui il n’y en a pas. Cette solution présente trois difficultés.
Il s’agit d’un investissement important et de plus, les standards des moteurs des paquebots sont différents et enfin, cerise sur le gâteau, il nécessite d’équiper le port d’un appareillage permettant de transformer l’électricité (à Monaco, le réseau électrique est de 20 K Volts) à 6 ou 12 K Volts selon les navires. Toutefois, seuls 5% des navires sont équipés d’un système de branchement. De plus, il convient d’investir dans un convertisseur de puissance car certains navires fonctionnement au standard américain, soit 60 Hz, alors qu’en Europe, le standard est de 50 Hz. Il conviendrait de créer une tourelle ou une grue sur le quai qui permettrait d’acheminer rapidement les câbles vers les navires. Difficulté supplémentaire, il semblerait que si cette finalité était réalisée, encore conviendrait-il que les paquebots suppriment quelques cabines clients pour s’adapter et évidemment diminuer leur rentabilité.
- Une troisième piste de réduction de plus de 90 % des émissions consiste dans l’utilisation d’épurateurs. Ce procédé neutralise une grande part des pollutions des gaz d’échappement à l’aide d’un fluide qui absorbe l’oxyde souffre. Les déchets produits sont stockés à bord et débarqués dans une installation de réception à terre. C’est l’ensemble de toute la population concernée qui en bénéficierait ; cela va des croisières, croisiéristes, personnel de bord, des riverains et des travailleurs
- Par ailleurs la Convention internationale MARPOL (annexe VI), fixe les limites aux émissions d’oxydes d’azote et d’d’oxyde de soufre. Même si pour certains les contrôles sont insuffisants, reste que la Méditerranée est absente de la zone où les contrôles sont effectués. Pour mémoire et c’est intéressant, sont couverts : la Manche, la zone mer Baltique mer du Nord, l’Amérique du Nord et les Caraïbes des États-Unis. Étendre au littoral atlantique et méditerranéen serait sans doute une piste complémentaire. Ce serait un joli coup d’échange avec nos partenaires méditerranéens.
Comme on le voit, parler de la pollution des navires de croisière n’est pas un acte démagogique. Même si les solutions sont parfois compliquées, esquiver ce problème est bien pire que de le nier !
Pour information complémentaire, trois chiffres qui mesurent les particules ultra fine : à Marseille, « rue de la Canebière » il y a 15 000 cm3 de particules ultra fines, chez les habitants ce sont 51 400 cm3 et au Major (à 100 m du navire) 309 000 cm3 !
A Monaco, en général, la taille des navires est inférieure à celle d’un navire XXL sui sert de mesure et qui a été étudiée, cela diminue d’autant les effets de la pollution…mais ne la supprime pas.
Daniel BOERI